Avant que cette presqu’île ne soit rattrapée par la rage de Neptune, le spectacle qu’elle offre au large vers l’entrée du Bassin et le Pyla est un enchantement chaque jour renouvelé.
Quels que soient le temps, l’heure, la marée, le panorama est ici à la fois saisissant de brutalité imprévisible et réconfortant de familiarité.
Du haut du chemin de dune, c’est la récompense, au couchant, d’une journée abrutie, les yeux dans le sable, à gommer l’invisible, à tamiser le sable de nos ordures.
Duel cruel entre un tamis et un tapis de débris
De préférence l’hiver, quand la plage est déserte et sert de décor au cruel duel qui se joue entre un tamis et un tapis de débris. Quand le vent pique, que le froid ralentit les gestes, que la pluie trempe les os, que les embruns tirent les larmes, en cette saison sans concession plus qu’aucune autre, je sais d’avance que la bataille est perdue. Elle l’est toujours.
« Rien ne décourage l’acharnement d’une fourmi » Victor Hugo
De cette confrontation directe avec les éléments, les pieds ancrés dans le sable ou la tête sous l’eau, je sors revigorée, énergisée. Ne laissant aucune empreinte, j’en efface même quelques-unes et je repars avec dans le sac les emplettes d’un marché abject, et dans la tête un trésor d’impressions fauves.
Cette saturation, c’est la surimpression en une image de ces milliers de petits bonheurs égoïstes vécus dans cette nature indomptable qui force en même temps l’admiration et l’humilité.