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Esthétique poétique de déchets plastiques échoués

Vanessa Balci : Démarches - La plastique des plages

L’histoire commence sur une plage, les yeux dans le sable.

Difficile sur le littoral de dire où commence l’océan et où s’arrête la terre ferme. Les géographes ont décidé pour nous que la ligne de séparation serait celle de la laisse de mer. Une ligne dessinée par la dernière vague et distinguant terre et mer. Une ligne fragile et mouvante à chaque marée, entre solide et liquide.

C’est dans cette laisse de mer que la houle dégueule algues, bois et déchets. Les premiers sont indispensables à la dune et à la vie servant d’habitat et de nourriture à toute une faune littorale; les derniers polluent.

Mes collages sont exclusivement composés de ces déchets plastiques échoués sur les plages. Ni colorés, ni taillés, ni modifiés, je les utilise tels que je les trouve sur le rivage, dans leur beauté singulière.

Si je consomme, je suis donc responsable des déchets que je produis et que l’industrie, l’agriculture et la pêche produisent en mon nom en amont. Mais l’industrie, l’agriculture, la pêche, le cadre politique complaisant et le système financier, préférant l’argent au vivant, portent une lourde part de responsabilité à laquelle ils échappent trop facilement en stigmatisant « les gens ». Je refuse et j’accuse cette culpabilisation, injuste et inéquitable, vaine et stérile ; tout comme je refuse de porter seule, avec « les gens » la responsabilité, alors que faire?

Refuser la fatalité du détritus et refuser que nos vies soient foutues.

Ecumer le littoral et remplir mes cabas du grand fatras que l’on ne veut pas ;

Valoriser chaque fragment en coup de pinceau, pour composer un tableau

Essaimer du beau, du pop, du rigolo avec ce qu’il y a de plus crado,

Répéter tous ces gestes jusqu’à esquisser un petit mais costaud manifeste d’écologie picturale.

Rêver à l’invention d’une humaine culture qui s’ancre dans un rapport mutuellement pérenne avec la nature.

Nous sommes la seule espèce du vivant à produire des déchets non compostables, non assimilables par la nature. Nous sommes le problème, donc nous sommes aussi la solution.

En tant que militante auprès de la fondation Surfrider, et en qualité d’Art’iviste, associée au collectif internation Splash Trash, mon ambition est de proposer, par l’art, un nouveau regard sur l’objet déchu, pour nous consoler de notre triste histoire, pour sortir du déni, pour imaginer une nouvelle utopie et l’offrir aux réinterprétations sensibles de chacun, pour que nous profitions longtemps encore de la plastique naturelle des plages. »

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