Dans la fureur bouleversante de 1942, Athelstan F. Spilhaus, océanographe et géophysicien sud-africain, développe son intuition d’une projection de l’océan mondial d’un seul tenant. Pour montrer, en une image, l’océan mondial comme un tout, il calcule la déformation des continents adjacents, forçant notre petite boule de feu et d’eau cosmique à se dessiner à plat dans un carré.
Cette nouvelle carte en deux dimensions place l’Antarctique au cœur du grand organisme liquide vivant. Notre assurance-vie, notre matrice originelle, l’utérus du monde.
L’attention se concentre sur l’océan, pour qu’il apparaisse dans toute son immensité et sa majesté, le plus fidèlement possible, quitte à distordre à l’extrême les continents qui le bordent.
Il faut attendre 1979 et 1983 pour que Spilhaus en dise davantage sur l’aide reçue par les géodésistes Hanson et Schmid dans l’élaboration des équations de distorsion et la modélisation des ellipsoïdes de révolution, mais il n’en livre pas les calculs, affaiblissant la portée de sa carte composite. Sa confrontation à la projection Adams II, le monde dans un carré (Adams, 1929), a montré quelques asymétries, corrigées par le système de coordonnées géographiques mondial (WGS, 1984).
La centralité de l’océan dans l’enjeu climatique accorde enfin à cette projection l’intérêt nécessaire à placer l’océan au cœur de notre avenir.
De l’importance de changer de perspective.